Sur les traces de cinq cimetières parisiens disparus
Le saviez-vous ?
Mise à jour le 22/10/2024
Sommaire
Si la Ville de Paris gère 20 cimetières créés pour la plupart au XIXe siècle, ces espaces modernes ont été précédés d’anciennes aires funéraires fondées à l’Antiquité et au Moyen Âge. À l’approche de la Toussaint, partons à la découverte de cinq de ces cimetières disparus avec les experts du pôle archéologique.
Les nécropoles antiques de Lutèce (5e, 13e et 14e)
Fondée au
début du Ier siècle de notre ère par les Romains, la ville de Lutèce adopte la
physionomie des autres cités de l’Empire :
-
un plan quadrillé ;
-
une voie principale nord-sud (cardo maximus) ;
-
une panoplie monumentale (forum, arènes, thermes) ;
-
des habitations privées ;
-
des nécropoles.
Ces « cités des morts » sont
traditionnellement situées en dehors des limites de la ville. Une norme dictée
par des motifs sanitaires mais également symboliques, afin d’éloigner la mort
des vivants.
Au cours de
son histoire, Lutèce a connu plusieurs nécropoles. La première est fondée au Ier siècle, aux abords du cardo maximus
(artère principale de la cité), qui correspond aujourd’hui à la rue
Saint-Jacques (5e). Les fouilles archéologiques menées dans ce secteur de Paris ont
mis en évidence de nombreux objets déposés auprès des défunts. De splendides
vases en verre et des statuettes en bronze ont notamment été mis au jour.
Une nouvelle
nécropole d’envergure se développe à la fin du IIIe siècle, au
croisement du boulevard Arago, du boulevard Saint-Marcel et de l’avenue des
Gobelins. Cette aire d’inhumation semble avoir été investie par les premiers
chrétiens de Lutèce, comme le suggèrent certains symboles gravés sur des stèles
funéraires dégagées lors de fouilles.
La nécropole royale de Saint-Germain-des-Prés (6e)
En 558, le
roi Childebert Ier (fils de Clovis) est inhumé au sein de l’abbaye
de Saint-Germain-des-Prés (6e). D’autres membres de l’élite mérovingienne
l’imiteront, au cours du siècle suivant. En 2015, une fouille réalisée par les
archéologues de la Ville de Paris a en effet révélé pas moins de 400 sépultures
correspondant à cette période. Il s’agit principalement de sarcophages en
plâtre décorés de motifs de croix pattées, de rosaces et de représentations
anthropomorphes.
En 639,
l’espace funéraire rattaché à l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés perd son
statut de nécropole royale lorsque le roi Dagobert inaugure la liste des
nombreux rois et reines inhumés au sein de la basilique Saint-Denis (Seine-Saint-Denis).
Le cimetière des Saints-Innocents (Paris Centre)
Au milieu du
Moyen Âge, le cimetière des Saints-Innocents devient le plus important cimetière
de Paris. Il est progressivement agrandi jusqu’à atteindre une surface de
6 000 mètres carrés au XVIIe siècle. La prospérité de ce
cimetière s’explique par son accessibilité financière : les défunts les
plus pauvres sont inhumés provisoirement dans des charniers avant que leurs restes ne soient exhumés et entreposés dans des ossuaires.
La centralité et la taille de ce cimetière finissent néanmoins par poser des problèmes
sanitaires. Les habitants du quartier se plaignent des odeurs et de
l’instabilité du terrain, fragilisé par le poids des corps empilés. En 1780, il est décidé de fermer le cimetière. Les ossements sont progressivement transférés
dans les carrières de calcaire creusées sur la rive gauche : c’est la destination
première des catacombes de Paris (14e).
À la place de cette ancienne nécropole est désormais érigée la fontaine des Innocents (Paris Centre).
Le cimetière du Carreau du Temple (Paris Centre)
La commanderie parisienne des Templiers, un ordre religieux et militaire, s’installe
au XIIe siècle à l’emplacement de l’actuel marché du Carreau du
Temple. Une forteresse est aménagée ainsi qu’une église dédiée à Sainte-Marie-du-Temple,
dont le cimetière a été entièrement fouillé par l’entreprise Eveha en 2013.
Cette
opération a permis d’étudier près de 180 défunts inhumés durant l’âge d’or des
Templiers (XIIe-XIVe siècles). La fouille a ainsi révélé que le
cimetière de l’église Sainte-Marie-du-Temple était réservé aux chevaliers ou aux clercs au service de l’ordre
durant cette période. En effet, la grande majorité des sépultures appartenait à
des hommes adultes, dont l’état de santé dénote d’un accès à des soins de
qualité et d’une bonne hygiène de vie grâce à leur statut.
Les cimetières juifs médiévaux (5e)
Certains cimetières du Paris médiéval sont dédiés à des populations spécifiques.
Les défunts sont notamment groupés selon leur confession, à l’instar de la
communauté juive. Côté rive gauche, il existait deux cimetières juifs, rue de la
Harpe (5e) et rue Galande (5e), en activité du XIIe siècle jusqu’à la dernière
expulsion des juifs de Paris par le roi Charles VI à la fin du XIVe siècle.
La présence
de ces aires funéraires a été attestée par l’archéologie en 1849, grâce à la découverte
de stèles gravées d’inscriptions hébraïques. L’étude des noms inscrits
sur ces stèles a notamment permis d’étayer nos connaissances sur l’anthroponymie des juifs
parisiens au Moyen Âge. Si les individus masculins portent majoritairement des
noms inspirés de la Bible (Isaac, Jacob, Moïse), les défunts féminins possèdent
souvent des noms romans (Reine, Florie, Précieuse, Ivette).
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