Être scaphandrier à Paris : la tête sous l'eau, mais sur les épaules

Série

Mise à jour le 28/02/2025

Scaphandriers de la DVD.
Ils plongent dans le canal Saint-Denis, le canal Saint-Martin et le canal de l’Ourcq afin d’entretenir les écluses et réaliser des travaux sous-marins. Focus sur quatre scaphandriers passionnés par leur métier, qu’ils exercent pour la municipalité parisienne.
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Alexandre A., Alexandre S., Bertrand et Ludovic. Ces professionnels de la Ville de Paris sont des travailleurs des profondeurs aux missions essentielles : sans eux, le réseau fluvial de la Ville de Paris ne pourrait pas fonctionner correctement. Les écluses, notamment, seraient susceptibles de se bloquer ou de rompre.
« Notre métier, c’est l’entretien des canaux et de leurs ouvrages d’art : prendre des cotes et des relevés sous l’eau, vérifier l’étanchéité des joints et des gonds des portes des écluses, réaliser des travaux de soudure ou d’électricité sous les ponts et les ponts tournants, exécuter des découpes à la lance thermique… », détaille Ludovic. La particularité c’est que ces missions se déroulent sous l’eau, avec une visibilité quasi nulle.
Plusieurs fois par semaine, à tour de rôle, les quatre scaphandriers effectuent ainsi une plongée pour réaliser ces réparations sous-marines, mais aussi des missions de nettoyage, comme le débouchage des grilles d’aspiration obstruées par des algues, des draps, des bouteilles, des vélos et autres d’objets.
Ils sont également sollicités pour inspecter les murs des quais ou les coques des bateaux de service. C’est eux aussi qui installent chaque année les remparts flottants des piscines du bassin de la Villette (19e) de Paris Plages ou qui ajustent le rideau à bulles installé au canal de l’Ourcq.
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Coordination entre la surface et le plongeur

Ce matin de janvier 2025, c’est Bertrand qui descend au niveau de l’écluse numéro 1 du canal Saint-Martin. Il ne fait que quelques degrés dehors, et guère plus dans l’eau…
Toute opération mobilise les quatre scaphandriers de l’équipe : un seul effectue une descente - on l’appelle l’opérateur -, les trois autres l’assistent et assurent sa sécurité. Alexandre S., dans la camionnette garée le long du canal, fait office de chef d’opération hyperbare sur cette mission : il contrôle les gaz qui alimentent le plongeur en air grâce à un narguilé. Il reste en communication avec lui en permanence par le biais d’un talkie-walkie également relié à ce tube.
Alexandre A. et Ludovic sont, quant à eux, les opérateurs secours, prêts à venir en aide à Bertrand si cela s’avère nécessaire. Car sous l’eau glacée et dans l’obscurité, le danger est omniprésent : blessures, coupures et risques liés aux interventions en milieu aquatique.
Scaphandriers de la DVD.
Bertrand enfile sa combinaison en caoutchouc et son casque renforcé (qui pèse 13 kilos !). Il ajoute des bouteilles de secours de 50 litres (10 kilos) en cas de problème d’alimentation en gaz depuis la surface. Il se concentre… « Le matin, on fait obligatoirement ce qu’on appelle “la demande du plongeur”, à savoir vérifier si notre collègue se sent bien mentalement ou physiquement. Si ce n’est pas le cas, il ne plonge pas, précise Alexandre A. Pour être en parfaite sécurité, il faut être conscient de tout ce que l’on fait et ne jamais avoir la tête ailleurs. »

Une descente, une mission

Et Bertrand se jette à l’eau ! La mission du jour ? Plonger au fond du canal pour dégager les déchets qui gênent l’ouverture de l’écluse. Le jeune scaphandrier ignore encore ce qu’il trouvera… L’équipe de surface le guide et lui envoie des outils spécifiques, comme un grappin pour les grands objets ou un seau accroché à un bout, pour aider à la récupération des objets immergés.
La « pêche » est (hélas) bonne : de nombreux déchets sont restés coincés dans la chambre à sable devant la porte de l’écluse. Notre plongeur n’émergera que trois heures plus tard, après avoir remonté des dizaines de seaux bien remplis. Aux éclusiers ensuite de disposer des ordures.

Scaphandriers de la DVD.
Pour intégrer l’équipe de plongeurs en scaphandre, il faut être détenteur d’un Certificat d’aptitude à l’hyperbarie, mention A, en cours de validité. Une fois par an, une visite médicale permet de contrôler les conditions physiques des agents. Certains, comme Ludovic, ont une expérience de plus de vingt années de plongée - dans sa famille, on est scaphandrier depuis quatre générations ! Et tous les membres de l’équipe ont eu des expériences professionnelles en dehors de la ville, notamment pour réparer les péniches ou les plateformes pétrolières au sein d’entreprises privées ou en freelance.
Mais exercer en tant que scaphandrier à la Ville de Paris, ce n’est pas qu’être un excellent plongeur, c’est aussi savoir manier une variété d’outils pneumatiques et hydrauliques (lances thermiques, perceuses, disqueuses) ainsi que des matériaux spécifiques, comme des enduits durcissant au contact de l’eau.
Dès leur prise de poste, les scaphandriers sont formés au maniement de ces outils au sein de leur atelier situé à Pantin avant de pouvoir les utiliser en fond marin. « On est même amené à usiner des pièces sur mesure en fonction des besoins », ajoute Alexandre A. Être scaphandrier à Paris, c’est certes avoir la tête sous l’eau, mais bien vissée sur les épaules, et savoir s’en servir !
Dans le canal, on trouve… de tout !
Il est évidemment totalement interdit de jeter quoi que ce soit dans le canal. Pourtant, les scaphandriers remontent des bouteilles, des vélos, des trottinettes, des batteries de voiture, des écrans d’ordinateur, des poussettes, des sèche-cheveux, des vêtements… Les plongeurs conservent même dans leurs bureaux une collection d’objets insolites repêchés au cours de leurs missions !
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